APHORISMES

Mourir pour des idées
Mourir pour des idées de mort lente, c’est facile quand on vous torture.
Vertu
Si l’on achetait la vertu comme on achète une baguette, j’aimerais voir les gens faire la queue le matin, à la sincèrerie.
Tradition & modernité
Ne pas s’asseoir sur les vieux principes. Ni sur sur les nouveaux. Bref, ne pas s’asseoir.
Avec le temps
Une saison sait-elle qu’elle ne fait que passer ?
Vérité absolue
De toutes les insultes, celle que l’on ne peut affliger à Farinelli est celle de « Couillon ».
(Agri)culture
Pour être éleveur; il faut aimer observer les animaux. Pour être artiste ; il faut aimer observer les Hommes… Et les éleveurs.
Errance (d’Arabie)
Celui qui erre sans but à un but bien précis : errer sans but.
Divertissement
«  Un Roi sans divertissement est un homme plein de misères »(frag. 5/7 Pensées de Pascal) et non l’inverse. Car il est évident qu’un homme plein de misères est uniquement un homme plein de misères.
Être femme
Il ne me manque qu’une paire de couilles pour être une vraie femme.
Avoir confiance
Si je ne vois rien en l’autre, est-ce à dire que j’ai une confiance aveugle ?
Histoire de poule et d’œuf
L’être humain inventa t-il d’abord le téléphone ou d’abord la solitude ?
Good old times
L’enfance s’arrête au moment où dire et entendre la vérité devient trop difficile.
La Léviatane
La femme est une louve pour l’homme.
Néant
Un individu peut supporter beaucoup mais pas rien.

histoires sans morale, ou presque

Humain, trop humain

Comment l’être-humain est devenu être-humain, je l’ignore, mais il existe des explications scientifiques, rationnelles et tangibles.

Comment l’être-humain est devenu inhumain, je l’ignore.

                                            13-04-2019 Turin
                              
Garde-fou

Le printemps à du mal à démarrer cette année.
Tant mieux car les ni les jeunes filles en fleur, ni leurs ombres ne sortiront pour flâner cette année. Elles faneront confinées sans que l’on ai pu les effleurer.

Faute de jolies fleurs, des géraniums en pot pendus aux barreaux sales de fenêtres sales sont les rares témoins d’un difficile changement de saison. Ils sont exécutés sans pitié devant des trottoirs vides sans un regard mesquin pour assister à leur sacrifice. 

Les presque-femmes aux fesses libres et les demi-hommes aux tétons apparents, accueillent les ramassis du soleil derrière leur garde-fou.

« Garde-fou »

Cet objet n’a jamais mieux porté son nom qu’en cette période de confinement.

Les politiciens devraient s’en servir pour leurs déclarations solennelles :
 « Citoyens ; protégez-vous et protégez vos proches, n’outre-passez pas vos garde-fous ! »

La police comme moyen de dissuasion : 
« Toute tentative d’escalade de garde-fou sera sévèrement réprimandée.»

Les médecins comme nouveau jargon : 
« C’est moi qui fait la nuit ce soir, je suis de garde-fou »

Les travailleurs sociaux comme campagne de sensibilisation :
« Je protège mon enfant, je le garde-fou ».

Les militaires comme injonction 
« Rompez. Demi-tour … GARDE-FOU ! »

                                            18-04-20 Turin     
                        
                                                                                  
Chômage forcé

Un acteur qui ne joue pas.
Un peintre qui ne peint pas.
Un musicien qui ne musicionne pas.
Un danseur qui ne danse pas.
Deviennent de détestables personnes.
Croyez-moi, je sais de quoi je parle.

                                          15-02-2020 Turin
Vivre sans 4G ?

N’allez nulle part sans un smartphone, vous risqueriez :

- de vous perdre
- de vous ennuyer
- de vous sentir seul(e)s
- de vous débrouiller par vos propres moyens

C’est drôle.
C’est exactement tout ce que je recherche.

                                            27-10-19 Turin
Le mistral, la mondialisation et les canards

Je ne ferai pas long feu en Italie si je n’apprends pas à être en retard.

Mon sens de la ponctualité et de la précision ont – paradoxalement – tendance à me nuire et je me confonds souvent en longues attentes au point de rendez-vous. Il faut donc que j’apprenne à aimer attendre car l’on découvre bien des choses dans l’attente.

Par exemple, depuis hier, un vent inhabituel souffle sur la cité Piémontaise qui, jusqu’ici, n’avait jamais considéré pertinent l’utilisation du mot "mistral" (vent de de secteur nord-ouest à nord, typique de la Provence et du Languedoc).

Mais c’est bien de mistral dont il s’agit. Je me sens en février dans le nord de l’Italie comme si j’étais dans le Luberon au début du printemps. La mondialisation a cela d’universel que mêmes les vents bénéficient d’accords de libre échange. Les rivières se mélangent, les terres se déplacent, les routes s’embrassent.
Dans sa grandeur, l’être humain imite la nature et l’on peut se sentir chez soi partout ; du Coca-Cola aux plastiques qui dansent sur les fleuves, plus besoin de voyager ! Il suffit de rester où l’on est, et c’est partout pareil. On peut voir des canards qui s’étouffent avec nos restes de frites aux quatre coins du globe.

L’attente me réussit. Je découvre les merveilles du monde : 
le mistral, la mondialisation et les canards.

                                      4-02-20 Turin. Italie.
Histoire sans passé

Hier je pioche la terre, la retourne de ça, de là pour y planter quelques menues patates qui gèleront plus tard, oubliées dans la grange par mégarde (fait avéré avec la précédente production de patates).

Liste non-exhaustive des trésors que cachaient le labour :

- un peigne en nacre

- une seringue en verre

- une semelle de chaussure (en plastique)

- une clef

- une serrure

- un stylo bille

- des tessons de bouteille de verre

Je tirais les conclusions suivantes : ou les habitants de cette maison étaient d’élégants (peigne en nacre) drogués (seringue en verre), ou bien vécut ici un poète serrurier (serrure) qui avait des amis qui étaient d'élégants drogués, ou bien encore le propriétaire qui était un cordonnier (semelle) alcoolique (tessons de bouteille) louait sa maison à un poète serrurier qui invitait d’élégants drogués à venir dans la maison qu’il louait au sus-nommé propriétaire cordonnier-alcoolique.

Ce qui m’apparaît évident après tout cela, c’est que le passé est un mystère et l’archéologie un travail difficile.

                                  30-04-2020. Bourcet. Italie
Tant pis.

Aujourd’hui j’ai cru apercevoir un rayon de soleil.
Je l’ai loupé.
Tant pis.

                                     2-04-20. Turin. Italie.
Monde parfait

Des adultes imparfaits font des enfants imparfaits, qui, à leur tour, feront de leur mieux pour engendrer des progénitures imparfaites en vue de perpétuer l’imperfection de l’humanité.

Tout cela me semble parfait.

                                      7-04-20. Turin. Italie
(se) Laisser tomber

Une goutte d’eau.

Sur une branche.

Hésite à tomber.

Se ravise.

Finalement ;
elle n’est pas si mal où elle est.

                                    2-05-2020. Bourcet. Italie
Lever le voile

Pour une femme musulmane qui avait décidé de ne revêtir que le simple foulard (et non le voile intégral), le port obligatoire du masque chirurgical est une petite tragédie.
La voilà qui se retrouve, sécurité oblige, avec le visage complètement couvert.

Ce que les acquis sociaux nous offrirent en liberté, l’hygiène et la sécurité nous l’ôtèrent.

                                     18-04-2020. Turin. Italie
Vertu citoyenne, respect des lois

Et William Shakespeare d’affirmer dans un ouvrage qui m’échappe
« il y a plus de mystères dans la réalité que dans l’ensemble de nos rêves ».

Et moi de découvrir, au détour des rues pluvieuses du printemps turinois que le prophète du théâtre anglais avait fichtrement raison.

Hier, rue Berthollet (à Turin donc) alors que j’errais clandestinement feignant d’être sortie pour un « motif impérieux », je croise un homme – le genre qui a fait des trottoirs de la ville, sa demeure principale - qui se lave consciencieusement les mains à la bière.
Je continue ma course et réalise un peu plus loin cette vérité glaçante parce que méconnue du plus grand nombre: 
cet homme est un génie!

Il applique les règles sanitaires à la lettre : 
IL SE LAVE LES MAINS AVEC DE L’ALCOOL !

Quelle classe. Quelle vertu. Quel sens épique de la réalité.
Si tous les citoyens avaient son sens du devoir !

Le vieux Bill avait raison; il y a davantage de mystères dans la crue réalité des coins de rue que dans nos rêveries les plus loufoques.

Je le félicite secrètement et prie pour que sa droiture ne le mène pas à sa perte. Il serait fâcheux qu’il persévère dans l’application disciplinée des lois et que par cohérence et loyauté il descende cul-sec une bouteille de gel hydroalcoolique.

                                    21-04-2020. Turin. Italie
Déformation professionnelle

Mon patron, éleveur de vaches laitières et producteur renommé de raclette, ne peut s’empêcher de s’adresser à moi en ruminant un chewing-gum.

Le travail rend libre.

                               28-05-2020. Crans Montana. Suisse